En juillet 2020, la Cour de justice de l’UE a statué que le bouclier de protection de la vie privée entre l’UE et les États-Unis n’offrait pas une protection adéquate des données des citoyens de l’UE lorsqu’elles étaient expédiées à l’étranger en raison de la nature intrusive des lois américaines en matière de surveillance, écrit Chercheur technique du GLOBSEC Policy Institute Zuzana Pisoň.
Ce verdict a eu un impact considérable sur les 7 100 milliards de dollars de transfert de données entre les États-Unis et l’UE. Le jugement a touché plus de 5 300 entreprises dont les modèles économiques étaient basés sur le transfert de données depuis l’UE, y compris les géants technologiques que sont Google, Facebook, Amazon et Twitter. Ces entreprises doivent maintenant chercher d’autres instruments juridiques qui leur permettront de maintenir les flux de données transatlantiques. Parmi les mesures alternatives, citons le Clauses contractuelles typeset d’autres instruments recommandés par la Conseil européen de la protection des données.
Et tandis que les pourparlers sur un nouveau cadre de protection des données mis en place juste après la décision de la Cour en août 2020, il est déjà clair qu’il n’y aura pas de solutions rapides. Les litiges relatifs à la protection des données délimitent des divisions fondamentales sur le sujet entre les États-Unis et l’UE, et la question se pose donc de savoir s’il existe des solutions suffisamment réalistes pour combler le fossé entre les deux économies sur les flux de données transatlantiques.
La priorité de Biden
La bonne nouvelle, c’est que le programme de protection des données a été déclaré l’une des priorités de M. Biden. Dès le premier jour de son administration, Biden a choisi un vétéran de la protection de la vie privée pour le poste clé supervisant les négociations pour un bouclier de protection de la vie privée de remplacement. Christopher Hoffqui occupera le poste de sous-secrétaire adjoint aux services du ministère américain du commerce, a pris ses fonctions le jour de l’inauguration. De telles nominations précoces ne sont toujours pas la norme – sous l’administration Trump, qui a connu des retards dans de nombreuses nominations, le poste actuel de M. Hoff n’a pas été occupé pendant environ six mois.
En pourvoyant ce poste dès le premier jour, le gouvernement Biden a signalé la volonté politique de se concentrer sur la politique de protection de la vie privée dans le domaine international et l’importance cruciale des flux de données mondiaux.
Révision de la législation américaine sur la protection de la vie privée
Toutefois, un nouvel accord de transfert de données devra sortir d’un contexte historiquement délicat. En 2015, le prédécesseur de Privacy Shield, le Accord sur la “sphère de sécurité” (Safe Harbor)a également été déclarée invalide pour des motifs similaires de mise en danger du droit à la vie privée par les autorités de surveillance américaines.
Commissaires européens a déclaré l’automne dernier qu’aucun remplacement ne serait possible sans une réforme de la législation américaine en matière de surveillance. Une mesure aussi radicale pourrait prendre des années à accomplir – à moins que les entreprises américaines ne fassent un effort majeur pour faire pression sur leur propre gouvernement afin qu’il apporte les changements nécessaires. Toutefois, si une réforme de la loi sur la surveillance devait avoir lieu, l’une des questions clés serait d’élargir les possibilités de compensation individuelle. Pour que les garanties de protection des données personnelles aux États-Unis soient vraiment complètes, une réforme devrait également inclure l’adoption de l’accord largement discuté la loi fédérale sur la protection de la vie privée.
Accord commercial transatlantique sur le numérique
Parallèlement à la réforme juridique interne aux États-Unis, l’ouverture d’un nouveau chapitre après l’arrêt du Bouclier de la protection de la vie privée nécessitera un nouvel accord commercial numérique avec l’UE établissant une base juridique solide pour des flux de données transatlantiques sans restriction.
Bruxelles a déjà exprimé sa volonté de collaborer sur les questions technologiques avec la nouvelle administration Biden, notamment par la création d’un “Conseil du commerce et de la technologie UE-USA” chargé de coordonner les positions communes et de stimuler le commerce transatlantique.
Comme le suggère Conseil des relations extérieuresUne disposition fondamentale de cet accord commercial numérique devrait permettre aux gouvernements d’imposer des restrictions au transfert de données sur la base de leurs lois sur la vie privée. Toutefois, ces restrictions ne devraient pas être arbitraires, ni agir comme des restrictions déguisées au commerce, et devraient être adaptées pour atteindre un objectif de politique publique. Les violations des règles seraient traitées par un système officiel de règlement des différends.
Dans le même temps, les États-Unis devraient promouvoir la coopération avec d’autres alliés démocratiques au sein d’un forum multilatéral, tel que l’OCDE, afin d’élaborer un cadre juridique commun pour l’accès des gouvernements aux données personnelles.
Economie vs politique
Si les transferts de données sont au cœur de l’économie transatlantique, ils sont depuis longtemps en proie aux doutes de l’Europe quant à la protection de la vie privée aux États-Unis. Comme mentionné précédemment, il existe des solutions techniques raisonnables pour mettre en place un nouveau cadre de régulation des flux de données transatlantiques. Toutefois, la bataille entre le droit à la vie privée des citoyens européens et la politique de sécurité nationale des États-Unis n’est pas une question technique, mais une question profondément politique. Les États-Unis pourraient prétendre que l’UE ne peut pas dicter la politique intérieure et étrangère américaine. En revanche, il est peu probable que l’UE sacrifie les droits à la vie privée inscrits dans sa Charte des droits fondamentaux
Cependant, le commerce numérique étant l’un des domaines qui connaît la plus forte croissance au niveau international, les enjeux économiques pourraient s’avérer tout aussi importants que les enjeux politiques. Une chose est d’ores et déjà certaine : trouver un terrain d’entente entre les deux alliés sera un effort de longue haleine, tant pour parvenir à un accord commercial international que pour moderniser le droit interne américain. La croissance rapide de l’économie numérique pourrait être un facteur décisif pour accélérer le processus.